Cela fait 12 ans que je vie à Paris, je ne suis jamais rentré dans la cathédrale de Notre-Dame. Pour plusieurs années, j’habitais même à deux pas. Je passais devant, je m’arrêtais, je la regardais et je continuais mon chemin. Quand je visite une ville à l’étranger, j’essaie d’aller voir les monuments les plus importants. Mais Notre-Dame était pour moi un peu comme le Parthénon : un monument qui a toujours été présent, à marquer une ville, un lieu, un passage et qui attend – avec une patience immense – à ce qu’on sent l’envie à lui rendre visite.
Je regardais hier sur l’Internet les infos, les commentaires sur Twitter, les images de la Notre-Dame en feu.
Choqué, j’avais du mal à dire quoique ça soit. Le bavardage que j’ai lu et entendu n’a pas apaisé ce choque.
Parmi les champs de recherche divers sur lesquels je me suis impliqué au passé fut celui de la restauration des monuments. Durant ma dernière période de visite à l’École Polytechnique d’Athènes, j’ai eu la chance de collaborer avec Prof. Tonia Moropoulou, qui a une énorme expérience dans la matière. Ainsi, j’ai pu participer à des conférences scientifiques sur ce vaste sujet. J’avais trouvé la restauration des monuments un champ fascinant. Notre collaboration visait à modéliser les approches gestionnaires appropriées ainsi que les modèles économiques compatibles avec cette activité.
La restauration des monuments est une activité interdisciplinaire par excellence, qui mobilise un ensemble hétérogène de sciences et de champs d’expertise autour d’un monument qui reste toujours singulier. Le travail de restauration est un travail dans le temps et sur le temps, qui vise tantôt à maintenir, tantôt à enlever, tantôt à contextualiser les traces de l’histoire et de la nature sur le monument.
Ainsi, j’étais étonné hier d’écouter à la télé le représentant du Vatican à l’UNESCO affirmer « en temps réel » que la décision était prise pour la « reconstruction » de Notre-Dame de Paris.
On ne peut pas reconstruire un monument. Les Grecs croyaient – et, pour une bonne partie, croient encore – aux signaux divines. Mise à part les formes spécifique que puisse prendre le divin et sa multiplicité, il faut pas être aveugle face aux signaux qui transcendantaux. Cette tragédie d’ampleur historique doit nous interroger. Certes, les travaux de restauration ne peuvent que commencer. Or, dans un premier temps, décréter le deuil aurait pu être plus approprié.